Les Wambergue... |
Saison 1979 ![]() |
Texte et photos :
Philippe Séclier (Echappement - Juin 1979) |
...trois
p'tits frères et puis s'en vont... En arrivant à Lunéville, dimanche matin 3 juin, la famille Wambergue, au grand complet, faisait grise mine. L'A310 V 6 de Philippe, leader patenté des «Wambergue's brothers» n'était pas en mesure de participer aux essais. Un joint de culasse fêlé laissait Philippe désabusé. "Prends la berlinette", lui suggéra Dominique, prêt à tout pour aider son frère. Aussitôt dit, aussitôt fait, le grand Philippe sautait dans la voiture de Domi avec la ferme intention de taper les "grosses GT". Dix heures plus tard, juché sur le toit de... son A310, Philippe savourait une victoire surprise inespérée mais amplement méritée: depuis le temps qu'il la cherchait celle-là... Philippe était cependant revenu sur sa décision. Après avoir couru les essais et la première manche qualificative, il décidait de reprendre sa A310: "C'est un pari difficile: si l'auto tient, je ne serai pas loin des premiers, sinon..." Mais pour reprendre son A310, Philippe devait obtenir l'autorisation des commissaires techniques... et de ses adversaires qui n'y voyaient aucun inconvénient : les Wambergue sont unanimement appréciés dans la petite famille du rallycross. Muni d'une pétition, Philippe était assuré de participer aux deux dernières manches avec SA voiture : "C'est une 3 litres groupe 5. Il y en a eu 3 en France, j'ai eu la dernière mais j'ai la trouille de la casser !" Le couteau entre les dents, sur une piste très boueuse, Philippe parvenait à réussir, pas deux fois, le 3e meilleur temps après avoir été 7' avec l'Alpine 1600: "Pourtant, dans ces conditions, la berlinette est plus maniable, on passe plus facilement la puissance, j'ai quand même près de 260 ch avec l'A310." |
Ils en ont
pourtant eu des autos, les frères Wambergue. Philippe a couru pour la
première fois, alors qu'il était bidasse, à une course de côte. Il terminait
1e, de sa classe devant un certain Jean-Hugh Hazard : "J'avais
une DS 21 et lui une Mustang !" Spécialiste des rallyes, Philippe a
souvent participé à des grandes épreuves nationales et internationales. Il a
couru les 6 derniers Neige et Glace, se classant 3' en 75, derrière Saby.
Aux 24 Heures d'Ypres, il abandonnait alors qu'il était second au scratch.
Il est également allé au Portugal en 75 et au Bandama en 74 avec une Citroën
SM : "J'étais un des seuls à passer dans les temps... avant d'abandonner,
la SM était vraiment extra sur la terre." Philippe a toujours été attiré par la terre ou la neige ; moniteur à l'école d'Isola, il a appris énormément : «J'aime conduire quand il n'y a pratiquement pas d'adhérence, il faut que ça glisse une voiture!» Après une participation à la Première Terre en 77 (6e au scratch) Philippe se tourne vers le Rallycross : «Je ne voulais plus courir en rallye, faute de moyens financiers." Après 12 ans de compétition, la passion pour la course est restée intacte chez les Wambergue. Dominique, plus âgé que son frère, a commencé beaucoup plus tard à se plonger dans cette ambiance : "Philippe a eu le virus de la course bien avant moi, le 1er rallye que nous avons fait ensemble, je m'en souviendrai toujours. C'était le rallye des petites cylindrées de Club des 2 CV de l'Orléanais. On parcourait 1000 km à vue, c'était extra avec la R8 !" Dominique a gardé aussi de bons souvenirs de l'époque Neyret. En effet, longtemps le Grenoblois les a aidé. La DS proto qu'il leur prêtait en a vu de toutes les couleurs : "Philippe était fantastique avec les tractions AV." Depuis les propulsions AR ont repris le flambeau. Dominique n'en est qu'à sa deuxième année de Rallycross. Il s'est tout de suite adapté aux courses sur terre : "On a la possibilité de courir suffisamment dans le week-end et, en plus, on s'amuse bien. Le rallycross est désormais bien implanté en France. On forme une grande famille, ce qui ne nous empêche pas d'être sérieux au moment voulu." Philippe et Dominique ont des idées différentes sur la question. Philippe estime que le Rallycross est une formule valable pour accéder à un échelon supérieur et pour obtenir une bonne carte de visite : "Le Rallycross ? C'est l'idéal pour avoir des contrats publicitaires. C'est nouveau, tout beau, il y a des spectateurs et les sponsors sont plus faciles à trouver." D'ailleurs, Philippe et Dominique ont décroché un contrat important, cette année, avec Duquesne Purina, firme spécialisée dans l'alimentation pour le bétail : "ils ont été emballés par le Rallycross, quand ils sont venus à Muret", nous précise Philippe. Dominique, quant à lui, est plus réservé : "Je pense que l'on n'a pas tout à fait saisi le problème du rallycross en France. Les pistes ne sont pas assez rapides. Il faut absolument choisir des circuits plus larges, favorisant le dépassement et, par là-même, le spectacle." |
Oui du spectacle
et du sport, il y en eut pourtant à Lunéville, la finale GT + de 1600 comme
la superfinale allaient tenir en haleine le public lorrain. De
rebondissement en rebondissement, Philippe Wambergue était parvenu à
distancer Lenoir, Bubetz et Snobeck. Il récidivait en superfinale, profitant
d'un départ moyen de Snobeck et Beltoise. Heureux comme un gamin qui vient
de faire une bonne farce à ses petits camarades, Philippe était tout sourire
à l'arrivée : "Depuis le temps que je courais après ! J'en avais gagné
une à Alençon mais elle ne comptait pas pour le Championnat de France et les
"grands" n'étaient - pas tous là." Dominique était autant satisfait que
le p'tit frère : "Philippe est très sérieux. C'est pour cette raison que
je lui ai laissé la berlinette, ce matin. Il a besoin qu'on lui botte un peu
le derrière, il est trop "bon" avec lui même... comme avec les autres
d'ailleurs !" Après que Dominique ait jugé son frère, nous avons demandé à Philippe de nous parler de Domi : "C'est un vraie bourrique (!) mais il fait du bon boulot et puis c'est quand même mon frangin... N'oublie pas d'aller voir Manu, c'est la vedette de la famille." Manu, c'est le 3e des quatre fils de la famille Wambergue, le mécano de service, l'homme à tout faire, le team-manager en quelque sorte. "Sans Manu, on ne serait pas là" me précise Dominique. Manu ne court pas mais l'envie ne lui manque pas. "Bien sûr que j'aimerais courir mais ils sont assez de deux et en plus, je serais, à coup sûr devant eux !" Philippe, hilare, en est tout fait persuadé : "Quand on fait des chronos sur notre petite piste en terre battue avec les scooters (!), Manu est souvent devant nous, alors pourquoi pas en rallycross !..." Leur dernière acquisition n'est autre qu'un triporteur ! Leur piste privée leur permet de s'entraîner (pour ne pas perdre la main) et aussi de s'amuser. Agriculteur pendant la semaine, Dominique a besoin de se détendre de temps en temps : "C'est normal pour un cultivateur de courir sur la terre ! quand tu conduis une 2 CV ou un tracteur des journées entières, tu as envie de te défouler." Décidément, ces frères Wambergue ont le diable dans la peau ! Philippe attend d'ailleurs la suite de la saison avec impatience : "Pour moi, c'est l'année ou jamais, de toute façon quoi qu'il arrive, je ne courrai plus en Rallycross, l'an prochain. Pour les projets on verra plus tard, auparavant j'attends avec impatience, d'être père de famille. La relève sera ainsi assurée, pourvu que ce soit un garçon..." |